Moins de contrôle, plus de marges de manœuvre : selon la neuvième édition de l’Observatoire du management d’Oasys Mobilisation, dévoilée le 29 novembre, le management fait doucement mais sûrement sa révolution, en mettant progressivement un terme au management directif. Concrètement, les managers ont lâché du lest dans leurs pratiques managériales : 90 % des collaborateurs estiment qu’ils ont « suffisamment d’autonomie pour faire leur travail ». Autrement dit qu’ils peuvent désormais organiser leur travail comme ils le souhaitent.
Le cabinet, a sondé, avec l’institut de sondage Kantar, 1 500 managers et collaborateurs, du privé et du public, sur l’état du management et la situation de travail.
L’explosion des nouvelles technologies n’est pas étrangère à cette tendance. De même, le bond du niveau de qualification des Français, la tertiarisation de l’économie ou encore l’avènement de nouveaux modes de gouvernance (management participatif…) ont ainsi permis de responsabiliser et de renforcer les marges de manœuvre des salariés au bureau.
Surtout, « les managers ont créé des conditions positives pour que les collaborateurs puissent voir plus directement leur contribution au projet de l’entreprise, explique David Destoc, directeur général, fondateur d’Oasys Mobilisation. Ils s’écartent progressivement de la notion de pilotage de leur activité pour aller vers des notions de développement individuel et collectif ».
Sans surprise, cette marge de liberté contribue à favoriser la motivation des salariés. 87 % aiment leur travail et 70 % d’entre eux se disent « personnellement très engagés dans le projet de leur entreprise ». C’est certes quatre points de moins qu’en 2021, en plein cœur de la crise sanitaire, mais trois points de plus qu’en 2017.
L’enquête tord au passage le cou à une idée reçue concernant les juniors. Car chez les 16-34 ans, l’engagement est au plus haut (75 %, contre 72 % pour les plus de 50 ans et 67 % pour les 35-49 ans). De même, les salariés des petites entreprises se disent très engagés (74 %) tout comme les télétravailleurs (73 %) quelle que soit la taille de leur entreprise. A condition toutefois selon Timothée Germain, responsable de projet au sein d’Oasys Mobilisation, que « ce mode de travail ne dépasse pas trois jours », faute de quoi le télétravail ne devient « plus bénéfique mais toxique ».
L’heure n’est donc pas à la démission : seuls 17 % des salariés envisagent de quitter leur entreprise dans les prochaines années et 6 % sont en recherche active. « La tendance est donc très majoritairement à la stabilité qu’elle soit choisie ou subie », indiquent les auteurs de l’étude.
Malgré cette embellie, des écarts de perception persistent entre managers et managés. Si les responsables hiérarchiques se considèrent, dans leur grande majorité (86 %), comme des « bons managers », les salariés sont, eux, plus dubitatifs (68 %). Mais le différentiel entre ces deux visions se réduit, il est à 22 points cette année alors qu’il culminait à 30 points en 2017 et même à 28 points en 2019. Ce qu’ils attendent de leur N+1 ? Pouvoir compter sur lui en cas de coups durs, être accompagnés en cas de changement et que leur chef prenne le temps pour manager les équipes.
« C’est l’un des grands enseignements de l’enquête : les salariés voient leur responsable hiérarchique comme quelqu’un qui fédère un collectif autour d’objectifs communs, qui fait grandir les équipes et pilote l’activité. Des défis importants à l’heure des transformations, numériques et écologiques, à l’œuvre », poursuit David Destoc qui voit à travers ce nouveau rôle une plus grande « maturité » des managers.
En clair, selon les salariés, un bon manager est avant tout doté de compétences « relationnelles et émotionnelles », susceptible de « créer de la confiance ». Les compétences techniques arrivent en deuxième position suivies par les aptitudes de leadership.
Reste qu’au quotidien les managers sont confrontés à des injonctions paradoxales, concède Timothée Germain. Car s’ils jugent leur métier « passionnant », ils sont parfois à la peine. Leur emploi du temps est semé d’embûches. A tel point qu’un tiers avoue en avoir « marre de manager ». Parmi les difficultés figurent la gestion des conflits (26 %), le maintien de la motivation de chacun (26 %) et l’acceptation des changements (18 %).
De plus, de l’avis de leurs collaborateurs, ils ne sont pas toujours reconnus par leur entreprise : 66 % des salariés insistent sur la faible reconnaissance accordée au rôle du N+1. Pas étonnant dans ces conditions que seuls 29 % d’entre eux aimeraient monter en grade. Ils étaient pourtant 37 % à briguer cette fonction en 2021.
D’où la nécessité selon le cabinet Oasys Mobilisation d’accompagner plus fortement les managers, acteurs clef des transformations. Parmi les pistes avancées, mettre en place une « qualité de vie managériale » via, par exemple, des échanges de pratiques entre pairs, prévenir les risques psychosociaux, investir dans la formation, mettre en place une gestion des « talents » au-delà de hauts potentiels ou encore accompagner les managers dans la conduite du changement …
