Pendant la période d’essai, les parties peuvent à tout moment et sans motif rompre le contrat de travail. Par ailleurs, l’application des règles relatives à la rupture du contrat est expressément écartée par le code du travail durant cette période (article L1231-1 du code du travail).
Dans la mesure où la rupture de la période d’essai n’a pas à être motivée, l’employeur peut donc se contenter de notifier au salarié qu’il a décidé de mettre fin à l’essai. Mais en aucun cas, il ne peut fonder sa décision de rompre l’essai sur un motif discriminatoire. A défaut, la rupture de la période d’essai sera considérée comme nulle et le salarié pourra demander réparation comme l’illustre une décision de la Cour de cassation du 25 juin 2025.
Dans cette affaire, une salariée avait été engagée par une compagnie d’assurance le 16 décembre 2013. Du 13 janvier au 17 août 2014, elle avait été placée en arrêt de travail. Le 22 juillet 2014, son employeur lui avait notifié la rupture de sa période d’essai avec effet au 18 août 2014.
La salariée conteste, devant la juridiction prud’homale, le bien-fondé de cette rupture s’estimant victime d’une discrimination liée à son état de santé.
La cour d’appel prononce la nullité de la rupture : la salariée avait apporté des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination liée à son état de santé et l’employeur de son côté n’avait pas démontré que sa décision reposait sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Elle condamne également l’employeur à verser au salarié une indemnité de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour réparation du préjudice subi, soit un montant inférieur à l’indemnité prévue par l’article L.1235-3-1 du code du travail pour un licenciement nul, au motif que les règles du licenciement ne sont pas applicables à la période d’essai en vertu de l’article L.1231-1 du code du travail.
La salariée conteste cette décision devant la Cour de cassation. Elle fait valoir que la rupture de sa période d’essai ayant été jugée nulle, il était logique qu’elle bénéficie de l’indemnité prévue par l’article L.1235-3-1 du code du travail. Elle invoque, en outre, l’application de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000 aux termes de laquelle la sanction d’une discrimination doit être effective, proportionnée et dissuasive considérant que cela n’avait pas été le cas en l’espèce.
La Cour de cassation confirme la décision d’appel et rejette la demande de la salariée et ce pour plusieurs raisons.
Sans surprise, la Haute Cour rappelle tout d’abord que la rupture du contrat de travail en raison de l’état de santé du salarié est nulle conformément à l’article L.1132-4 du code du travail.
► Il s’agit d’une confirmation de jurisprudence. La cour de cassation avait déjà jugé que la rupture de la période d’essai prononcée pour un motif discriminatoire (en l’occurrence pour raisons de santé) était nulle au sens de l’article L.1132-1 du code du travail (arrêt du 16 février 2005).
Concernant la directive européenne 2000/78/CE du 27 novembre 2000 dont le salarié réclamait l’application, la Cour de cassation répond qu’elle ne l’est pas en cas de discrimination fondée sur l’état de santé.
Enfin, elle poursuit en rappelant que le salarié, dont la rupture de la période d’essai est nulle pour motif discriminatoire, ne peut prétendre à l’indemnité prévue en cas de licenciement nul, mais à la réparation du préjudice résultant de la nullité de cette rupture. Elle se fonde sur l’article L.1231-1 du code du travail qui exclut l’application des règles légales régissant le licenciement et son indemnisation pendant la période d’essai.
Il revient donc aux juges, qui disposent en la matière d’un pouvoir souverain d’appréciation, de déterminer le montant des dommages-intérêts à verser au salarié. Mais ils ne sont pas tenus de lui accorder une indemnité correspondant à au moins six mois de salaire.
► Cette décision du 25 juin 2025 de la Cour de cassation se situe dans le prolongement de sa jurisprudence antérieure. Elle a en effet déjà jugé qu’en cas de nullité de la rupture de la période d’essai fondée sur des motifs discriminatoires, le salarié ne peut prétendre ni aux indemnités de ruptures ni à l’indemnité de préavis (arrêt du 12 septembre 2018).
