Issue d’un accord national interprofessionnel, la rupture conventionnelle a été créée par la loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail comme un nouveau mode amiable de rupture du contrat de travail, indépendant du licenciement et de la démission. La rupture conventionnelle est désormais dans le viseur du gouvernement qui recherche des économies pour son budget 2026.
Selon le document de travail envoyé par le gouvernement aux partenaires sociaux, la durée moyenne de l’indemnisation chômage des salariés ayant signé une rupture conventionnelle est de 468 jours au lieu de 346 pour l’ensemble des autres motifs de rupture du contrat de travail.
Autre reproche, le montant moyen des allocations journalières pour les demandeurs d’emploi ayant signé une rupture conventionnelle s’élève à 52,3 euros contre 40,9 pour les autres.
Le gouvernement cite enfin la Direction statistique du ministère du travail (Dares) : « Dans 75 % des cas, la rupture conventionnelle se substitue à une démission ». Un chiffre cependant très ancien puisque ce document remonte à juin 2018 et qui portait sur l’évolution des ruptures de contrat de travail depuis 25 ans…
Ce thème figurera dans la lettre de cadrage demandant aux partenaires sociaux de négocier sur le sujet. En attendant, l’Unédic, organisme paritaire de gestion de l’assurance chômage, a évalué les effets de différentes pistes envisagées dans un document daté du 30 juin 2025.
L’Unédic relève tout d’abord que les ruptures conventionnelles ont augmenté de 17 % en cinq ans, pour atteindre le nombre de 515 000 en 2024. Elles occasionnent une dépense d’allocation de 9,4 milliards d’euros, soit 26 % des dépenses totales. Toujours en 2024, elles ont conduit à l’ouverture de droits pour 385 000 personnes. En moyenne, elles sont âgées de 25 à 44 ans et souvent diplômées de l’enseignement supérieur.
Pour autant, dans l’objectif de faire des économies, plafonner les indemnités « poserait plusieurs difficultés » selon l’Unédic : cela pourrait interagir avec le plafonnement des allocations en cas d’activité non salariée perçues par des personnes qui créent une entreprise après leur rupture conventionnelle. Cette modification a été actée dans l’accord de novembre 2024 signé par les partenaires sociaux, avec pour objectif de limiter les effets d’aubaine.
Par ailleurs, les allocataires ayant perçu une indemnité supra-légale liée à leur rupture conventionnelle subissent un différé d’indemnisation. Cela signifie qu’ils ne perçoivent leur allocation chômage qu’après une sorte de délai de carence. Ce différé est calculé en appliquant un diviseur de 109,6 à ces indemnités supérieures à ce que prévoit la loi. Aujourd’hui, ce différé est plafonné à 150 jours et concerne 35 % des ouvertures de droit après une rupture conventionnelle, soit 13 000 personnes.
Selon l’Unédic, « des effets de comportement pourraient influer sur les économies réelles des mesures ». Tout d’abord, certains allocataires pourraient renoncer à signer leur rupture conventionnelle. D’autres pourraient négocier avec l’employeur un licenciement plutôt qu’un rupture. De fait, indique l’Unédic, » ce premier effet comportement mènerait à une hausse des économies puisque l’allocataire ne serait plus du tout indemnisé, lorsque le second mènerait à une baisse des économies puisque l’allocataire ne serait plus concerné par la mesure ».
Un relèvement du plafond du différé aurait selon l’Unédic un effet financier très fort dès la 2e année, entre 30 et 200 millions d’euros. Cet effet bénéfique sur les finances se réduit ensuite, pour un effet annuel en régime de croisière de 15 à 60 millions d’euros.
Cependant, ces chiffrages ont été réalisés sans tenir compte des effets de comportement précités. L’Unédic poursuit : » Or, on peut s’attendre à ce qu’une partie des allocataires, notamment dans le cas d’un nouveau plafond très élevé, ne signent plus de rupture conventionnelle ou ne soient plus indemnisés du tout après leur ouverture de droit. Ainsi, les effets de la mesure pourraient se révéler en réalité plus élevés en termes de moindres dépenses d’indemnisation »
