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Il y a faute lourde lorsque le salarié commet des actes fautifs uniquement dans le but de porter préjudice à son employeur ou, comme c’est le cas dans cette affaire, lorsque le salarié agit pour satisfaire son intérêt personnel tout en ayant conscience de porter préjudice à son employeur.

Un chargé de recrutement débauche et recrute des salariés pour le compte d’une société tierce

En l’espèce, un salarié chargé de recrutement senior se livre, pendant l’exécution de son contrat de travail, aux actes suivants, bien qu’il soit lié par une clause d’exclusivité avec son employeur :

il procède au recrutement de salariés pour le compte d’une société tierce dont les profils sont très proches de ceux appelés à travailler pour son employeur, ce dernier ayant une activité de conseil en management et en système d’information et la société tierce une activité de conseil en système logiciels informatiques ;
il participe au débauchage de plusieurs salariés de son employeur et tente d’en débaucher d’autres ;
il utilise les informations et le système d’information mis à disposition par son employeur au bénéfice de la société tierce et présente à cette dernière des candidatures initialement destinées à son employeur.

Licencié pour faute lourde, le salarié conteste son licenciement.

La cour d’appel estime que ce licenciement repose sur une faute grave et non sur une faute lourde. Pour elle, s’il est incontestable que ces fautes ont pu nuire à l’employeur, le salarié, qui avait l’intention de greffer sa future entreprise de conseil sur la société tierce, a agi dans son intérêt personnel. La cour d’appel en déduit que la faute lourde ne peut pas être retenue en l’absence d’intention de nuire, laquelle ne peut pas se déduire des seules nuisances causées à l’entreprise par le comportement fautif du salarié.

L’employeur conteste la décision des juges du fond et soutient que la recherche d’un profit personnel par le salarié ne permet pas d’exclure une intention de nuire constitutive de la faute lourde.

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel.

► Ici, le contrat de travail du salarié comportait une clause d’exclusivité. Mais même en l’absence d’une telle clause, le salarié reste tenu à une obligation de fidélité et de loyauté envers son employeur (article L.1222-1 du code du travail) et ne peut pas, par exemple, se livrer à des activités concurrentes.

Agir dans son intérêt personnel n’empêche pas la qualification de faute lourde

La Cour de cassation commence par rappeler que la faute lourde est caractérisée par l’intention de nuire à l’employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d’un acte préjudiciable à l’entreprise (article L.1235-1 du code du travail ; arrêt du 22 octobre 2015 ; arrêt du 8 février 2017).

En l’occurrence, la Cour de cassation estime que l’intention de nuire à l’employeur est caractérisée dès lors que le salarié travaille pour une société tierce au profit de laquelle il recrute des salariés en utilisant les moyens et informations fournis par son employeur, débauche des salariés employés par ce dernier et détourne des candidatures adressées à son employeur.

La jurisprudence a par ailleurs retenu la faute lourde dans l’hypothèse où un responsable des ressources humaines d’une société de gestion avait dissimulé son intérêt personnel dans la réalisation d’opérations financières mettant en cause le fonctionnement de la société employeur, à l’origine d’un conflit d’intérêts dont l’employeur n’avait pas connaissance (arrêt du 10 février 2021).

► A l’instar de la faute grave, la faute lourde prive le salarié du droit aux indemnités de licenciement et de préavis mais pas de l’indemnité compensatrice de congés payés qui reste due (arrêt du 28 mars 2018). En revanche, seule la faute lourde peut engager la responsabilité civile du salarié à l’égard de son employeur (arrêt du 11 avril 1996 ; arrêt du 22 septembre 2011) et peut lui faire perdre le bénéfice de la portabilité des couvertures santé et prévoyance en cas de chômage (article L.911-8 du code de la sécurité sociale).

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Le fait pour un chargé de recrutement de débaucher des salariés de son employeur et de détourner des candidatures adressées à ce dernier au profit d’une société tierce constitue une faute lourde et ce, peu importe qu’il agisse dans son intérêt personnel.
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L’employeur peut rompre le contrat de travail d’un salarié déclaré inapte s’il justifie de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien de l’intéressé dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi (article L.1226-2-1 du code du travail pour l’inaptitude résultant d’un accident ou d’une maladie non professionnels ; articles L.1226-12 et L.1226-20 du code du travail pour l’inaptitude résultant d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle). Il est alors dispensé de son obligation de rechercher et de proposer au salarié inapte des postes de reclassement (arrêt du 8 février 2023).

Par un arrêt du 12 juin 2024, la Cour de cassation répond pour la première fois, à notre connaissance, à la question de savoir si, lorsque le médecin du travail dispense expressément l’employeur de rechercher un reclassement, celui-ci peut malgré cette dispense chercher à reclasser le salarié et, le cas échéant, le licencier pour refus abusif de ses propositions de reclassement.

A noter : L’enjeu est ici important. En effet, il résulte de l’article L 1226-14 du Code du travail que le salarié inapte consécutivement à un accident du travail ou à une maladie professionnelle qui est licencié pour inaptitude a droit au versement d’une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité minimale légale de licenciement ainsi qu’à une indemnité compensatrice d’un montant égal à celui de l’indemnité légale compensatrice de préavis. Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues si l’employeur établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif (arrêt du 20 février 2008 ; arrêt du 17 mai 2016).

Si l’avis d’inaptitude dispense expressément l’employeur de chercher à reclasser son salarié…

En l’espèce, une salariée victime d’un accident du travail avait été déclarée inapte à tous postes dans l’entreprise par le médecin du travail. Celui-ci avait précisé sur son avis « danger immédiat, tout maintien dans l’entreprise serait préjudiciable à son état de santé » mais, malgré cette mention, l’employeur avait fait des propositions de reclassement à la salariée qu’elle avait refusées. Licenciée pour refus abusif de trois postes de reclassement, cette dernière avait saisi la juridiction prud’homale afin que son licenciement soit jugé sans cause réelle et sérieuse.

À l’appui de son recours, la salariée faisait valoir que, dès lors que l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail le d ispensait de rechercher un reclassement, l’employeur aurait dû la licencier pour inaptitude et impossibilité de reclassement au lieu de s’évertuer à lui proposer des postes de reclassement pour finalement la licencier pour un motif de refus abusif de reclassement, sans lui verser la totalité des indemnités auxquelles elle avait droit.

Pour sa défense, l’employeur faisait valoir que, s’il résulte de l’article L 1226-12 du Code du travail que l’employeur peut rompre le contrat de travail si l’avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé, il n’en résulte aucune interdiction pour lui de rechercher à reclasser le salarié, ni aucune obligation de procéder immédiatement à son licenciement.

… il ne peut pas lui faire des propositions de reclassement et le licencier pour les avoir refusées

La Cour de cassation, qui ne partage pas cette dernière analyse, approuve les juges du fond d’avoir jugé le licenciement de la salariée sans cause réelle et sérieuse. Pour elle, dès lors que la cour d’appel avait constaté que l’avis d’inaptitude mentionnait expressément que tout maintien de la salariée dans l’entreprise serait préjudiciable à sa santé et que les propositions de reclassement faites par l’employeur n’étaient pas compatibles avec les recommandations du médecin du travail, elle ne pouvait que juger que le licenciement de la salariée était injustifié.

► Cette solution semble logique. En effet, dès lors que le médecin du travail indique expressément sur l’avis d’inaptitude d’un salarié qu’il est inapte à tous postes dans l’entreprise et que tout maintien dans l’entreprise serait préjudiciable à sa santé, aucune proposition de reclassement ne peut sérieusement lui être faite dans l’entreprise sans méconnaître cet avis, et le refus du salarié d’accepter les propositions de reclassement de l’employeur ne peut pas avoir un caractère abusif. La seule possibilité qui s’offre alors à l’employeur est de licencier le salarié pour inaptitude et impossibilité de reclassement et de lui verser les indemnités spécifiques prévues par l’article L 1226-14 du Code du travail auxquelles il a le droit en cas d’inaptitude d’origine professionnelle. Il est donc conseillé à l’employeur, en cas de dispense expresse de reclassement du médecin du travail sur l’avis d’inaptitude, d’engager la procédure de licenciement sans trop tarder après ce dernier car, si le contrat de travail n’est pas rompu au bout d’un mois, il doit recommencer à verser au salarié le salaire correspondant à l’emploi qu’il occupait avant la suspension de son contrat de travail (article L.1226-4 du code du travail en cas d’inaptitude résultant d’un accident ou d’une maladie non professionnels ; article L.1226-11 du code du travail en cas d’inaptitude résultant d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle).

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Si le médecin du travail mentionne expressément sur l’avis d’inaptitude d’un salarié que tout maintien dans l’entreprise serait préjudiciable à sa santé, l’employeur ne peut pas lui proposer d’être reclassé dans l’entreprise, et le licenciement prononcé pour refus de reclassement est abusif.
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Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales (article L1332-4 du code du travail).

Le point de départ de ce délai de prescription des poursuites disciplinaires correspond au jour où l’employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l’ampleur des faits reprochés au salarié (arrêt du 17 février 1993 ; Conseil d’Etat, 20 avril 2005). Dans cette hypothèse, l’employeur s’entend également du supérieur hiérarchique, même non titulaire du pouvoir disciplinaire (arrêt du 23 juin 2021 ; arrêt du 19 avril 2023).

Dans certains cas, les faits fautifs ou leur ampleur exacte sont révélés par une enquête interne ou un audit, et la date de leur connaissance par l’employeur, point de départ du délai d’engagement des poursuites disciplinaires, a pu être fixée à la date de remise du rapport d’enquête (arrêt du 26 janvier 1994 ; arrêt du 16 mars 2010 ; arrêt du 23 mars 2011).

Date de la connaissance exacte des fautes du salariés

Mais ce n’est pas systématique : si les juges constatent que l’employeur a eu plus tôt une pleine connaissance des faits qu’il reproche au salarié, c’est cette date qui fait courir le délai, comme l’illustre la Cour de cassation dans un arrêt du 29 mai 2024. Dans cette affaire, une enquête interne a été déclenchée le 13 octobre 2017, dont le rapport a été remis le 29 novembre 2017. Entre temps, le 30 octobre, le salarié a envoyé à son supérieur hiérarchique un courriel décrivant de manière circonstanciée le montage frauduleux qu’il avait mis en place.

Les juges du fond, approuvés par la Cour de cassation, ont estimé que c’est à la lecture de ce courriel que l’employeur a eu une connaissance exacte des fautes du salarié, sans avoir à attendre les conclusions de l’enquête. C’est donc à partir du 30 octobre 2017 que courait le délai deux mois pour engager une procédure disciplinaire. La convocation à entretien préalable fait le 3 janvier 2018 était donc tardive, privant de cause réelle et sérieuse le licenciement qui s’en est suivi.

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La rédaction sociale
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L’employeur a deux mois pour engager une procédure disciplinaire à partir du jour où il a une connaissance exacte et complète des faits fautifs qu’il reproche au salarié, et ce quelle que soit la date de dépôt d’un rapport d’enquête interne.
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En application de l’article L.1121-1 du code du travail, de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et de l’article 9 du code civil, le salarié a droit, même aux temps et lieu du travail, au respect de l’intimité de sa vie privée (arrêt du 2 octobre 2001). L’employeur ne peut donc pas s’immiscer dans sa vie affective, conjugale ou familiale ou intervenir dans ses choix de vie ou de consommation, sauf restriction légitime et proportionnée (arrêt du 13 janvier 2009). En d’autres termes, l’employeur ne peut pas prendre en compte des éléments de la vie privée du salarié, indifférents à la relation de travail et qui n’ont donc pas à lui être révélés, pour prendre une décision dans la sphère professionnelle.

Pour autant, si la situation familiale d’un salarié fait apparaître un risque de conflit d’intérêts, l’intéressé, tenu à une obligation de loyauté, doit-il en informer l’employeur ? C’était la question posée ici à la cour d’appel de Versailles.

Un auditeur interne qui n’informe pas son employeur sur sa situation familiale

Un salarié occupant des fonctions d’auditeur interne est licencié par son employeur. Ce dernier lui reproche un manque d’intégrité et de loyauté, une volonté de tromper incompatible avec le lien de confiance inhérent à sa fonction. En effet, selon lui, le salarié aurait sciemment dissimulé sa situation matrimoniale avec une ancienne salariée de l’entreprise. Or la fonction occupée par le salarié et son niveau de responsabilités lui permettent d’accéder à de nombreuses informations confidentielles. C’est ce qui justifie, d’ailleurs, les engagements qu’il a pris en application du code d’éthique de l’entreprise, qui lui impose notamment de porter à la connaissance de l’employeur tout conflit d’intérêts potentiel.

Pour l’employeur, son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, en raison du risque de conflit d’intérêts lié à la dissimulation de la situation matrimoniale du salarié, et plus particulièrement de la situation professionnelle de son épouse, ex-salariée en litige avec l’entreprise, et de la perturbation du fonctionnement du service d’audit interne.

Pour le salarié, le motif de licenciement retenu par son employeur, en contradiction avec son droit au respect de sa vie privée et de sa liberté d’expression, justifie l’annulation du licenciement.

La dissimulation volontaire du lien matrimonial est avérée

La cour d’appel recherche, d’abord, si le salarié a sciemment caché son lien matrimonial à son employeur. Elle relève, à cet effet, différents éléments de faits :

l’absence de mise à jour de documents RH (dossier personnel, mutuelle et prévoyance) le faisant ainsi toujours apparaître comme célibataire ;
sa présence seul à certains évènements où les conjoints étaient invités et, en parallèle, la présence de cette dernière présentée comme une petite amie lors de divers dîners pendant une mission d’audit, et comme ayant travaillé pour une autre entreprise du même secteur.

Pour la cour d’appel, ces agissements caractérisent une volonté de dissimulation de la situation réelle de sa compagne et un refus d’informer son employeur de sa situation matrimoniale et donc du risque de conflit d’intérêts.

Pour autant, le salarié était-il en droit de ne pas informer son employeur au nom du respect de sa vie privée, alors même qu’il existait un risque de conflit d’intérêts potentiel ?

La vie personnelle du salarié ne peut pas justifier un licenciement disciplinaire…

La cour d’appel rappelle, ensuite, qu’en eux-mêmes des éléments de la vie privée du salarié ne peuvent pas constituer, en principe, une faute justifiant un licenciement. Seul un licenciement non disciplinaire peut être envisagé lorsque, par son comportement, et compte tenu de la nature de ses fonctions et de la finalité propre de l’entreprise, le salarié a causé un trouble caractérisé au sein de cette dernière (arrêt du 17 avril 1991).

… sauf manquement du salarié à son obligation de loyauté

Le principe du respect de la vie personnelle du salarié peut toutefois être écarté lorsque les faits de sa vie personnelle caractérisent un manquement à une obligation découlant de son contrat de travail.

C’est d’ailleurs sur ce terrain que la cour d’appel poursuit son analyse. Elle s’interroge sur la question de savoir si le risque de conflit d’intérêts posé par la situation maritale du salarié, tenu d’exécuter loyalement le contrat de travail, lui imposait une obligation d’information de l’employeur.

A noter : Ainsi, la cour d’appel met en balance le respect de la vie personnelle du salarié et l’obligation de loyauté qui impose au salarié (comme à l’employeur) d’exécuter son contrat de travail de bonne foi prévue par l’article L.1222-1 du code du travail.

Une obligation d’information du risque de conflit d’intérêts pesait sur le salarié

Les juges du fond rappellent que, pour la Cour de cassation, le seul risque d’un conflit d’intérêts ne peut pas justifier un licenciement, dès lors qu’aucun manquement du salarié à l’obligation contractuelle de bonne foi n’est caractérisé (arrêt du 21 septembre 2006).

Pour la cour, l’existence d’un conflit d’intérêts doit s’analyser au regard de plusieurs critères alternatifs : un défaut de loyauté, une absence de transparence, une absence de neutralité, d’indépendance ou d’impartialité et le non-respect de l’intérêt social.

En l’espèce, elle constate que le salarié était tenu, du fait de ses obligations contractuelles, de faire connaître tout changement intervenu dans sa situation familiale et surtout, en vertu des clauses de la charte éthique de l’entreprise, d’informer d’un risque possible de conflit d’intérêts. Une obligation d’information pesait donc bien sur lui.

Son refus d’informer a créé un doute légitime sur sa loyauté

La cour d’appel poursuit, en relevant que le niveau hiérarchique et les responsabilités et missions de contrôle d’un auditeur interne exigeaient de sa part transparence, exemplarité et loyauté à l’égard de son employeur.

La cour d’appel en conclut que l’obligation d’information pesant sur le salarié ne portait pas atteinte à sa vie privée. Le fait d’avoir dissimulé son lien matrimonial avec une ancienne salariée a provoqué un doute légitime sur sa loyauté à l’égard de l’employeur.

Les faits justifient donc le licenciement du salarié, qui repose sur une cause réelle et sérieuse.

► Il semble que la position du salarié dans l’entreprise ait été essentielle dans l’appréciation par les juges de la violation de son obligation de loyauté.
Dans le même ordre d’idées, on rappellera la solution récente retenue par la Cour de cassation à propos du DRH qui entretenait une liaison sentimentale avec une représentante du personnel de l’entreprise : les juges ont considéré qu’en n’informant pas l’employeur de sa situation le salarié, cadre de direction, a manqué à son obligation de loyauté, ce qui justifiait son licenciement pour faute grave. Les juges ont en outre retenu, en l’espèce, à titre de circonstance aggravante, le trouble causé dans l’équipe par la révélation de la situation matrimoniale du salarié, cette information ayant déstabilisé ses collègues et perturbé le travail.

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Sophie André
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Dès lors que les responsabilités d’un salarié exigent de sa part transparence et loyauté à l’égard de son employeur, il est tenu de lui faire part de tout risque de conflit d’intérêts. Le fait de s’abstenir de l’informer sur son lien matrimonial avec une ancienne salariée peut donc justifier son licenciement.
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Avant que l’actualité sociale ne reprenne avec la nomination d’un nouveau gouvernement dans les jours qui viennent et la rentrée du Parlement qui devra se pencher sur le prochain budget, nous récapitulons les nouveautés publiées cet été. 

La réforme du partage de la valeur se met en place 

Le 10 février 2023, les partenaires sociaux ont abouti à un accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur. Une loi du 29 novembre 2023 en a transposé les dispositions. Deux décrets d’application ont été publiés cet été.

Le premier précise notamment les modalités d’affectation de la PPV sur les plans d’épargne salariale ou retraite et relève les plafonds de versements unilatéraux de l’employeur sur ces plans : lire notre article du 3 juillet 2024.

Ce texte règlementaire comporte également des dispositions relatives aux modalités des avances sur intéressement et participation, au relèvement des plafonds de versement unilatéraux aux plans d’épargne salariale ou retraite et au calcul de la participation en cas de congé de paternité. Il fixe en outre la liste des labels des fonds d’épargne verte ou socialement responsable est fixée

Le second crée trois nouveaux cas de déblocage anticipé de l’épargne salariale liés à des travaux de rénovation énergétique, l’achat de véhicules à électricité ou à hydrogène et l’activité de proche aidant : lire notre article du 9 juillet 2024.

Ce décret précise également le seuil d’effectifs à retenir pour la mise en place de dispositifs expérimentaux dans les petites entreprises, les nouvelles indications à indiquer dans l’accord collectif relatives aux avances sur intéressement et participation et au relèvement des plafonds applicables à l’abondement patronal unilatéral destiné à favoriser l’actionnariat salarié.

A ces deux décrets s’ajoute un questions-réponses sur le partage de la valeur dans les TPE-PME réalisant des bénéfices réguliers : lire notre article du 12 juillet 2024.

Le Boss s’enrichit et se restructure 

Le Bulletin officiel de la sécurité sociale (Boss) est mis à jour régulièrement.

Parmi les nouveautés de l’été, notons : 

l’intégration d’une nouvelle rubrique relative aux contributions à la formation professionnelle et à l’apprentissage et un nouveau chapitre consacré à ces contributions dans la rubrique « Effectif ». Après consultation publique, ces contenus seront opposables à l’administration respectivement le 1er novembre 2024 et le 1er octobre 2024 : lire notre article du 25 juillet 2024
les modalités d’application au versement mobilité du dispositif de neutralisation des effets du franchissement de seuil : lire notre article du 22 juillet 2024
les précisions sur le régime social applicable depuis le 1er juillet 2024 aux ZRR et ZFRR : lire notre article du 3 juillet 2024

► A noter que la page d’accueil du Boss est modifiée en vue de préparer l’intégration future de nouvelles rubriques opposables : lire notre article du 2 août 2024.

La contre-visite médicale a enfin sa réglementation 

Attendu pendant de très longues années, le décret qui devait déterminer les modalités de la contre-visite médicale de l’employeur a été publié au Journal officiel le 6 juillet : lire notre article du 9 juillet 2024. Ces dispositions sont applicables depuis le 7 juillet. Le texte précise les règles d’information du salarié, l’objet et les modalités de la contre-visite ainsi que son issue (suspension des IJSS, nouvel examen).

Vous pouvez également consulter notre infographie du 22 août 2024.

La POE individuelle est relancée

La préparation opérationnelle à l’emploi individuelle (POEI) est une aide au financement d’une formation permettant à un demandeur d’acquérir les compétences nécessaires pour occuper un emploi. Un décret d’application de la loi Plein emploi du 18 décembre 2023 a fixé fixe une durée plus courte pour les contrats pouvant être conclus à l’issue de la POEI et encadre le tutorat mis en place pour assurer la formation.

France Travail, dans une délibération publiée cet été, précise les modalités de cette POEI « rénovée » : lire notre article du 1er août 2024.

bénéficiaires ; 
conditions d’attribution ; 
montant de l’aide ; 
modalités de versement. 

Un nouveau partage des responsabilités entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice 

Un décret du 5 juillet 2024 un partage équitable des coûts des accidents du travail et maladies professionnelles des salariés intérimaires entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice et ce, quelle que soit l’incapacité qui en résulte : lire notre article du 19 juillet 2024.

A noter que ces dispositions entreront en vigueur pour la détermination des cotisations AT/MP à compter de l’année 2026.

Les sanctions renforcées en matière d’emploi de travailleurs étrangers entrent en vigueur 

La loi immigration du 26 janvier dernier a réorganisé le mécanisme de sanctions à l’encontre des employeurs de salariés étrangers sans titre de travail qui encourent de ce fait des sanctions administratives et pénales. Une amende administrative a ainsi été créée en lieu et place de la contribution spéciale précédemment due à l’Ofii. Un décret du 9 juillet 2024 en a fixé les modalités, resserré les conditions exigées de l’employeur sollicitant une autorisation de travail et étendu le champ d’application de la sanction au donneur d’ordre : lire notre article du 18 juillet 2024.

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Florence Mehrez
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Décrets sur le partage de la valeur, mise à jour du Bulletin officiel de la sécurité sociale, modalités de la contre-visite médicale… faites le tour de l’actualité sociale de cet été avant de plonger dans le grand bain de la rentrée !
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Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise doivent, si l’entreprise appartient à un groupe, s’apprécier au niveau du secteur d’activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude (article L.1233-3, al. 12 du code du travail).

L’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 a précisé la notion de secteur d’activité permettant d’apprécier la cause économique du licenciement afin de combler un vide juridique. Celle-ci est caractérisée, notamment, par la nature des produits, biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché (article L.1233-3, al. 14 du code du travail).

Cette définition est applicable aux procédures de licenciement économique engagées depuis le 24 septembre 2017.

Jusqu’alors, aucune définition du secteur d’activité ne figurait dans les textes, et celle dégagée par la jurisprudence était peu claire, la Cour de cassation s’en étant remise, en la matière, au pouvoir souverain des juges du fond qui s’appuyaient sur un faisceau d’indices.

Dans un arrêt non publié, la Haute juridiction avait toutefois retenu des critères comparables à ceux figurant à l’article L.1233-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 22 septembre 2017 (arrêt du 10 février 2010). Elle avait également précisé que, lorsque la société employeur appartient à un groupe, sa spécialisation dans un produit déterminé (arrêt du 8 juillet 2008 ; arrêt du 23 juin 2009) ou dans une activité donnée (arrêt du 31 mars 2021) ne suffisait pas à exclure son rattachement au secteur d’activité du groupe.

Dans plusieurs arrêts du 26 juin 2024, dont l’un est destiné à être publié au bulletin de la Cour de cassation, la chambre sociale confirme le maintien de sa jurisprudence dans le cadre juridique issu de l’ordonnance du 22 septembre 2017.

En l’espèce, la spécialisation d’une entreprise dans la dermatologie de prescription…

Dans cette affaire, une entreprise exerçant une activité de recherche et de développement en dermatologie de prescription procède à plusieurs licenciements dans le cadre d’une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.

Un certain nombre des salariés licenciés contestent le motif économique de la rupture de leur contrat de travail devant la juridiction prud’homale. À l’appui de leur recours, ils font valoir que le secteur d’activité au niveau duquel doit être appréciée la cause économique des licenciements ne peut pas se réduire à la spécialisation de l’entreprise dans le domaine de la dermatologie des médicaments de prescription ; il doit être étendu au secteur d’activité du groupe auquel l’entreprise appartient, c’est-à-dire au domaine médical, paramédical et/ou cosmétique des soins de la peau.

La société employeur estime, pour sa part, que le secteur d’activité à prendre en compte pour apprécier la cause économique des licenciements doit se limiter à la dermatologie de prescription, son domaine de spécialité, qui se détache clairement des deux autres secteurs d’activité dans lesquels intervient le groupe, à savoir la dermatologie esthétique et correctrice, d’une part, et la dermatologie cosmétique grand public pour la santé de la peau, d’autre part.

Elle explique à cet égard qu’il existe des différences entre les trois secteurs d’activités en termes de :

nature des produits concernés : médicaments délivrés sur prescription vs produits injectables destinés à être vendus dans des cliniques, et crèmes grand public pour le soin de la peau vendues en droguerie ou parapharmacie ;
clientèle ciblée : patientèle de médecins vs usagers de cliniques et clients de drogueries ou parapharmacies ;
concurrents et réseaux de distribution : pharmacies vs cliniques, drogueries ou parapharmacies.

… n’exclut pas son rattachement au domaine médical, paramédical et cosmétique des soins de la peau

La cour d’appel ne retient pas cette analyse. Elle juge au contraire que la spécialisation invoquée par la société employeur ne suffit pas à exclure son rattachement à un secteur d’activité plus étendu, à savoir celui du domaine médical, paramédical et cosmétique des soins de la peau regroupant les trois segments d’activité du groupe (« prescription », « esthétique et cosmétique » et « consumer » grand public).

Pour arriver à cette déduction, les juges d’appel s’appuient sur un faisceau d’indices, relatif notamment :

à la nature des produits ;
à la division scientifique de recherches dont relève la société employeur, qui regroupe l’ensemble des phases de recherche, d’études précliniques et cliniques des projets en « prescription », en « esthétique » et en « consumer » ;
au même site industriel de production ;
à la clientèle des produits dermatologiques à laquelle ils s’adressent ;
et aux conditions de commercialisation, sans qu’il ne soit distingué de marchés différenciés.

Saisie du pourvoi de l’employeur, la Cour de cassation approuve l’arrêt d’appel. Tout en confirmant son attachement à la méthode du faisceau d’indices pour déterminer le périmètre d’appréciation de la cause économique du licenciement, elle réitère la position qu’elle avait prise avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 au sujet des licenciements prononcés en raison de difficultés économiques. Elle va même au-delà en l’étendant aux licenciements prononcés en raison de mutations technologiques ou de menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise.

Elle juge en effet, aux termes d’un attendu de principe, que la spécialisation d’une entreprise dans le groupe ne suffit pas à exclure son rattachement à un secteur d’activité plus étendu, au sein duquel doivent être appréciées les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise.

► A notre avis : bien que rendue au visa de l’article L.1233-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, la solution retenue garde son intérêt dans le cadre juridique actuel, l’ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 et la loi n° 2018-217 du 20 mars 2018 n’ayant apporté aucune modification à la définition du secteur d’activité permettant d’apprécier la cause économique du licenciement.

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La rédaction sociale
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La Cour de cassation applique pour la première fois sa jurisprudence sur le périmètre d’appréciation de la cause économique du licenciement aux procédures engagées depuis le 24 septembre 2017. Comme par le passé, elle juge que la spécialisation d’une entreprise dans le groupe n’exclut pas son rattachement à un secteur d’activité plus large
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